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Performance et excellence : le modèle de Charles Handy (Septembre 2013)

 

1. LE TEMPS DES PARADOXES

Chacun de nos lecteurs a probablement entendu ou lu le récit de l’expérience métaphorique  de Peter SENGE dans son ouvrage  « La cinquième discipline » [First Editions] :

Si l’on plonge une grenouille vivante dans une casserole d’eau bouillante, l’animal tentera, par un saut réflexe, de s’échapper de ce qu’il considère sans doute comme un danger mortel …

Si l’on met cette même grenouille (toujours vivante) dans une casserole d’eau froide et que l’on chauffe progressivement l’eau pour l’amener à ébullition, la grenouille ne bougera pas et finira cuite sans vraiment s’en apercevoir ! Situation pour le moins paradoxale dans laquelle le batracien ne se voit pas mourir pris qu’il est par la douce torpeur liée à la fausse sécurité d’un climat confortable …

Charles HANDY, dans sa réflexion autour des postures managériales individuelles et collectives, donne à cette « histoire » un prolongement tout aussi percutant qu’éminemment opérationnel !   

Charles HANDY, citoyen irlandais né  en 1932, doté d’un cursus brillant (Oxford, MIT, cadre dirigeant de la Shell,…), est considéré aujourd’hui comme l’un des plus éminents philosophe et auteur quant à la thématique du management dans ses aspects organisationnels et managériaux ; auteur d’une dizaine de livres universitaires et grand public, il cultive un style imagé et délibérément dérangeant, en particulier dans « Le Temps des Paradoxes » [Editions Village Mondial].

 

Qu’est-ce que le temps des paradoxes ?

Nos sociétés occidentales créent un ensemble de situations paradoxales qui perturbent notre champ rationnel et éthique. HANDY a identifié neuf paradoxes principaux qui sont en voie de marquer notre époque.

Il est nécessaire (indispensable … ?) de les comprendre, d’en identifier les manifestations pour tenter de vivre avec eux. Leur mise en évidence est le premier outil de leur résolution.

Quels sont ces neuf paradoxes ?

  • Le paradoxe de l’intelligence.

L’intelligence est devenue la nouvelle forme de propriété. L’intelligence focalisée, ainsi que la capacité à acquérir et appliquer la connaissance et le savoir-faire sont devenues la nouvelle source de richesse.

  • Le paradoxe du travail.

Quand le travail n’est pas monétisé, tout le monde semble occupé. En revanche, au fur et à mesure que l’on donne une valeur monétaire plus importante au travail, son volume diminue du fait de son coût élevé.

  • Le paradoxe de la productivité.

La monétarisation de quelques nouvelles variétés de travail en quête d’efficacité a conduit à une spécialisation dramatique de la main-d’œuvre.

  • Le paradoxe du temps.

Alors que l’on s’attendait à avoir plus de temps libre grâce à l’utilisation de nouveaux moyens de production et de communication plus efficaces, le temps libre se fait de plus en plus rare. En effet, nombreux sont ceux qui occupent plus d’un emploi afin d’augmenter leurs revenus, mais dans le même temps, utilisent cette accroissement de ressources … pour acheter du temps libre !

  • Le paradoxe des riches.

Les sociétés riches vivent de plus en plus longtemps et ont de moins en moins d’enfants. Ceci pose le problème de leur capacité à maintenir un potentiel de croissance économique basé sur la consommation.

  • Le paradoxe des organisations.

Les organisations deviennent des « organisations organisantes » au lieu d’organisations structurantes au service de l’emploi ; le travail à temps plein se fait rare et l’organisation induit plus de flexibilité que de stabilité ; ainsi, au sens traditionnel du terme, l’organisation devient de plus en plus invisible alors qu’on en réclame en permanence les effets positifs.

  • Le paradoxe du vieillissement.

Le paradoxe du vieillissement consiste en ce que chaque génération se sent différente de la génération qui la précède alors qu’elle met tout en place pour que la suivante lui ressemble …

  • Le paradoxe de la justice.

En essayant de traiter chacun d’une manière juste et égale, la justice peut aboutir à des situations complètement contradictoires. Mais puisque la justice relève de cette égalité de traitement, la situation finale sera toujours supportée par l’Institution.

Ces paradoxes, s’ils ne sont pas identifiés et intégrés, peuvent conduire une structure (entreprise, institution, nation, etc.) au déclin ; celui-ci est d’autant plus imperceptible qu’il se manifeste, comme tout effet pervers, par antinomie d’une démarche positive, pensée et mise en œuvre comme telle : qui ne veut pas être plus compétitif par des outils de production plus performants ? Qui ne souhaite pas mettre en place une organisation « souple » afin de répondre aux aléas du marché ?  Qui ne recherche pas un instrument de justice égalitaire ? L’intégration et la concrétisation de ces différents items sont généralement suivies de performance accrue, de succès technologiques, commerciaux, sociaux, etc. 

Dans ces conditions, la prise en compte des deux courbes que constituent PERFORMANCE et EXCELLENCE prend un caractère essentiel ; c’est par leur association positive en temps et en intensité que le changement (au sens très générique du terme) pourra positivement s’opérer.

2. LE CHANGEMENT, CLE DU PROGRES 

Le déclin n’est pourtant pas irrémédiable, à condition de prendre un virage avant que la première courbe ne commence à décliner. Nous avons besoin du dynamisme du premier élan pour arriver à amorcer le changement ; HANDY note que le temps nécessaire pour aller du point A au point C est d’environ deux ans avant que le mouvement ascensionnel reprenne. 

L’enjeu principal du processus (mais surtout ses résultats positifs !) est donc d’amorcer un nouveau souffle lorsque tout va bien et que l’entreprise prospère. Soyons vigilants quant aux indicateurs positifs qui nous poussent à « continuer de la même manière » ; c’est ainsi qu’agissent  nombre d’entre nous  (« on ne change pas une équipe qui gagne » dit l’adage !) jusqu’à ce qu’ils s’aperçoivent qu’il est trop tard pour changer (point C sur la première courbe). 

Nous verrons, dans notre prochaine lettre, quelques approches méthodologiques liées  à cet enjeu.

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